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Cette école d'Arts Martiaux Traditionnels a été fondée à Bordeaux en 1975 par Frédéric DUPERTOUT. Par la forme et par l'esprit, elle ne le cède en rien aux écoles traditionnelles d'arts martiaux que l'on rencontre au Japon. Le karaté, le ju jitsu que l'on y enseigne sont issus des plus vieilles techniques que le Maître SANO Teruo reçut de ses anciens maîtres, et qui furent rassemblées sous le nom de "YOSEIKAN SANO RYU " - et plus récemment - "SANO RYU KARATE JUTSU"

dimanche 31 août 2014

LES ARTS MARTIAUX ONT POUR BUT LA VICTOIRE !




Je ne résiste pas au plaisir de vous transmettre un conte très connu au Japon. Je le considère comme un des plus instructifs concernant notre pratique. Mais je vous laisse le soin d'en tirer toute la leçon. Et il y aurait beaucoup à dire.

Le Samouraï et le chat zen


Un samouraï, pourtant expert en arts martiaux, n'arrivait pas à se débarrasser d'un gros rat qui avait élu domicile dans sa demeure et y faisait moult dégâts. Le rongeur était très vif et très malin. Il esquivait les coups de sabre et déjouait tous les pièges. Le maître des lieux finit donc par se rendre sur le marché pour acheter un chat. Un marchand lui fit l'article et il revint avec un jeune mâle plein de vie. Après une semaine de miaulements, de bonds et de cavalcades effrénées, le fringant matou était toujours bredouille.
Le samouraï mécontent retourna donc rendre le chat au marchand qui lui vanta aussitôt les mérites de sa dernière acquisition : un tigré dans la force de l'âge. A l'entendre, il n'y avait pas meilleur chasseur de rats !

Effectivement, le nouveau venu se montra plus expérimenté et plus subtil. Il restait de longues heures à l'affût derrière un meuble. Il se déplaçait en rasant les murs, rampait dans l'ombre sans éveiller l'attention. Mais au bout d'une semaine, le rat courait toujours. Furieux, le porteur de sabre rapporta le chat au marchand et lui réclama son argent.
Le samouraï rendait régulièrement visite à un moine zen d'un temple voisin. Il lui parla de son problème.
- Eh bien, lui dit le bonze, empruntez donc quelque temps notre vieux chat. Ici, grâce à lui, nous n'avons aucun rongeur !
Et il l'emmena dans le dojo où sur un zafu, un coussin de méditation, dormait un matou grassouillet quelque peu décati, le crâne à moitié dégarni en manière de tonsure. Le guerrier rapporta chez lui le minet et le déposa endormi sur un tatami sans que celui-ci ne paraisse s'être rendu compte qu'il avait changé de domicile.
L’attitude du chat monastique était des plus consternantes : il passait son temps à dormir sur le tatami, toujours à la même place, près du feu, ne se levant que pour manger sa pitance et faire ses besoins. A croire qu'il avait pris les mauvaises habitudes de certains moines qui, après s'être rempli la panse, faisaient zazen des heures durant en piquant du nez !
La semaine n'était pas finie que déjà le samouraï rapportait au temple cette bouche inutile à nourrir.
- Ne soyez pas si impatient ! s'exclama le bonze. Gardez-le encore quelque temps, faites-moi confiance. Je suis sûr qu'il finira par vous donner entière satisfaction.
Sceptique, le gentilhomme rentra chez lui avec le vieux matou. Les jours se succédèrent sans que son attitude ne change et, comme le dit le proverbe : quand le chat dort, les souris dansent. En l’occurrence, le rat en prenait de plus en plus à son aise. Il s'enhardissait même à venir tâter des plats qui allaient mijoter sur le feu, effrayant la servante. Le vieux matou, toujours immobile, ne montrant aucune réaction, le rongeur ne se soucia bientôt pas plus de lui que s'il était empaillé ! Et un jour, trottinant à portée de patte, il fut saisi par la brusque détente du chat zen. En un éclair, il était égorgé.
Le samouraï, qui avait assisté de loin à la scène, n'en crut pas ses yeux. Il se remémora l'un des principes de la stratégie chinoise : endormir la vigilance de l'adversaire. Il rapporta le vieux matou et fit un don au temple. Puis il médita la leçon et, dit-on, fit de notables progrès dans la pratique du sabre.

In "Contes des sages samouraïs" de Pascal Fauliot aux éditions du Seuil
Ouvrage dédié à son maître, Jacques Normand
 
Crédit : Philippe Flohic